L'éducation numérique selon EdNum
constitue un non-sens écologique

Non-sens écologique
Du point de vue de l’écologie, le plan de numérisation de l'école obligatoire dans le canton de Fribourg prévu pour 2025 est une absurdité. La fenêtre dessinée par le GIEC dans son dernier rapport pour plafonner nos émissions carbones tombe à la même échéance[1]. Introduire 31'260 machines à l'école[2] augmente le problème d’une manière non-négligeable.
Du point de vue des émissions de gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique, le numérique a émis 4% de ces émissions en 2019, soit davantage que le transport aérien civil. Il est prévu que cette part doublera d’ici 2025 pour atteindre 8% du total[3]. Cette augmentation dangereuse est la conséquence directe de la numérisation de notre société.
Mais les coûts écologiques ne s’arrêtent pas au GES. Ils peuvent être répartis en quatre phases[4] :
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coûts liés à l’extraction des matières premières (pollutions des sols et des eaux, consommation d’énergie fossile, épuisement de certains matériaux, expropriations, conditions de travail (travail forcé, dangerosité, etc.)
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coûts liés à la fabrication du matériel informatique (consommation d’eau et pollution des nappes, utilisation d’énergie fossile, de produits toxiques)
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coûts liés à l'utilisation du numérique (utilisation croissante d’électricité)
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coûts liés à la gestion des déchets numériques (obsolescence programmée ; faible taux de recyclage rendu difficile du fait de la complexité technique, coût économique élevé, métaux trop mélangés et trop dispersés ; métaux polluants)
Notons que l'impact écologique néfaste du numérique est relevé sommairement dans le rapport du conseil d'Etat lui-même, sauf que celui-ci a visiblement décidé de ne pas prendre en compte cet aspect-là, malgré sa volonté affichée d'agir en fonction des critères du « développement durable »[5].
Selon l'UNESCO "si l’on prolongeait d’un an la durée de vie de tous les ordinateurs portables dans l’Union européenne, cela équivaudrait à retirer près d’un million de voitures de la circulation." [6]
Que dire du canton de Fribourg qui prévoit de décupler le parc informatique actuel?
Notes
1
« Dans les scénarios que nous avons évalués, pour limiter le réchauffement à environ 1,5 °C (2,7 °F), les émissions mondiales de gaz à effet de serre devraient atteindre leur valeur maximale avant 2025, puis diminuer de 43 % d'ici à 2030 », Communiqué de presse du GIEC, 4 avril 2022, facsimile (ipcc.ch)
2
« Le nombre de machines à déployer auprès des écoles, pour l’ensemble de l’école obligatoire, s’élève aujourd’hui à 31 260 machines. », Rapport explicatif de la stratégie éducation numérique de l’école obligatoire ordinaire et spécialisée du canton de Fribourg (désormais : Rapport Explicatif)
3
Climat : l’insoutenable usage de la vidéo en ligne : Un cas pratique pour la sobriété numérique, The Shift Project, juillet 2019
4
Le désastre de l’école numérique, Philippe Bihouix et Karine Mauvilly, Seuil, 2016.
5
Voir l’évaluation de la durabilité du projet publiée par le Conseil d’Etat, selon laquelle le projet est « défavorable » sur le plan énergétique, sur le plan des matériaux, et « défavorable avec quelques points favorables » sur le plan des risques climatiques et sur le plan de la qualité de l’air extérieur et intérieur. On relève notamment :
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Qu’aucun point lié à l’écologie n’est noté « très défavorable ».
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Que le critère « diversité biologique et espace naturel » et le critère « gestion et qualité du sol et de l’eau » ne sont « pas concernés » par le projet. Cela prouve que les impacts hors de la Suisse n’ont pas été pris en compte.
6
Presse / Articles / Conférences
Ci-dessous : Quelques parutions dans la presse ou quelques articles en lien avec l'éducation numérique et son impact sur l'environnement.

La Liberté
Les besoins sont ailleurs à l'école
16/11/2022
A part ça, tout va très bien...
17/02/2023
«Se réveiller de l’ébriété numérique»
Lien PDF
27/03/2023
Et qu'en dit au juste ChatGPT ?
28/03/2023

Conférence
Vers le tout numérique à l'école : Pour quel impact écologique ?
par Sébastien Morard, Docteur en géographie
10/05/2023
Mais pourquoi y a-t-il un laisser-faire face à cette pollution numérique ?
«C’est parce que cette pollution est invisible. Quand vous regardez un smartphone, vous voyez un bel objet au design épuré, et vous ne voyez pas les mines de terres rares à ciel ouvert qu’il a fallu exploiter de manière très polluante pour produire les dizaines de métaux qu’il contient. Vous ne voyez pas non plus les moyens de transport qui ont été mobilisés pour leur faire faire plusieurs fois le tour de la planète. Et vous ne voyez pas que ce téléphone a un fil à la patte, qui le relie à un réseau de câbles et de serveurs, à des systèmes d’informations et centres informatiques bien réels.»
Solange Ghernaouti, spécialiste en cybersécurité à l’UNIL